J’habitais
dans un petit village où toutes les maisons sont faites de pierres.
Au centre du village dépassait le clocher de la petite église.
L’angélus rythmait la vie du village. Les gens se levaient à 7h,
mangeaient à 12h et rentraient chez eux à 19h.
Je
rendais visite régulièrement à une personne âgée qui vivait dans
ce village. De sa petite maison de pierre, la cheminée fumait toute
la journée. C’était le seul moyen de se chauffer. Des escaliers,
avec des marches irrégulières, nous menaient à l’intérieur de
la maison, mais lui, conservait encore une bonne allure de marche.
J’entendais ses sabots
qui claquaient sur le sol ; je devinais que c’était lui avant
de le voir. Un béret qu’il ne quittait jamais était vissé sur la
tête. Il se promenait tous les jours dans le village et par tous les
temps. Il parlait à tout le monde, de choses banales, de la pluie et
du beau temps.
Il me serrait la main,
même quand j’étais petit, avec ses grosses mains râpeuses.
Il se reprenait pour me
parler en français car « lo patoès l’escapaba », le
patois lui échappait, mais je le priais de continuer.
Jamais il ne revenait
chez lui les mains vides : il apportait soit des légumes du
jardin, soit des œufs des poules et sinon un bout de bois pour la
cheminée faisait l’affaire.
Dans
sa maison, tout était sombre, les petites ouvertures laissaient
entrer très peu de lumière. La lueur du feu éclairait légèrement
l’intérieur. Au milieu de la pièce, une table couverte d’une
nappe cirée attendait qu’on vienne s’asseoir pour partager un
verre ou une confiserie. Je ne pouvais jamais refuser au risque de le
vexer.
Il se dirigeait vers le
buffet. La porte grinçait à chaque fois. Il attrapait une boîte en
métal qu’il déposait sur la table comme un coffre au trésor. Il
en sortait du chocolat ou des gâteaux qui avaient une odeur
particulière et unique. Cette odeur, je la reconnaîtrais entre
mille.
Aujourd’hui, je pense
que c’était simplement une odeur de moisissure !
Au
début de l’automne, je partais avec lui me promener dans la
nature, sur les chemins de terre pour chercher des branches de
noisetier. Il portait « la poda », c’était en fait la
faucille. Et moi, je choisissais des cailloux pour casser quelques
noisettes cueillies au passage. On revenait avec de fines
branches de noisetiers et de grosses et épaisses branches de buis
qui avaient une odeur forte et inoubliable.
Il cultivait son jardin
et partageait ses légumes avec ses voisins. Il cueillait des fruits
de son verger. On rentrait à la maison, il installait les branches
près de la fenêtre à côté du tabouret. Il prenait son opinel et
il taillait de longues lamelles de la branche de noisetier. Il en
faisait plusieurs d’avance avant de fabriquer. Puis une heure
après, comme par magie, un panier prenait forme.
Aujourd’hui, je pense
souvent à lui ; ses paniers en noisetier sont très utiles pour la
cueillette des champignons, les légumes du jardin, les noix et toute
autre récolte.
C’est une personne qui
aimait la nature et les choses simples. Il m’a appris à vivre et à
profiter de ce que la nature peut nous apporter. Il n’a jamais eu
beaucoup d’argent mais il vivait de ce qu’il avait. Alors
qu’aujourd’hui, les gens ne savent plus profiter de ce que la
nature nous offre.
Merci Gaston pour ce que tu m’as
appris !
Robin
Je suis très émue par ce petit texte plein de la simplicité et de la douceur des gens et des choses, de leur poésie même , époque que j'ai connue et d'ailleurs le personnage me rappelle mon grand père ,car lui aussi l'hiver taillait des branches d'osier et tressait des paniers près de la cheminée !!!!!!!! Un bonheur simple !
RépondreSupprimerElido